Session LII : Le Maître de l'Air
General Summary
Une fois les éclaireurs rentrés, la réunion d’état-major débuta afin d’avoir un aperçu de la situation globale. Marcus débuta avec son expédition au Pic des Azlants. Accompagnés des autres Guerriers du Pardon, ils avaient voyagé en suivant la crête de la chaîne de montagne montant vers le nord-ouest. Le trajet avait été plutôt tranquille et sans trop de surprise, mais il racontait son récit avec les sourcils froncés, annonçant une complication ou déception.
« Nous n’avons malheureusement pas réussi à atteindre le Pic, car en réalité… il est complètement enveloppé dans un blizzard épais et glacé. N’étant pas préparé à cela, il nous était impossible d’entrer dedans sans un grand risque d’y laisser nos peaux. ». Il marqua une petite pause. Puis après une légère hésitation, il continua.
« Je ne suis pas un expert en magie, mais je suis certain qu’il ne s’agit pas là d’un phénomène naturel, et qu’il faut être un incantateur particulièrement puissant pour maintenir un état de tempête pareil. À moins qu’il s’agisse d’un artefact ou une protection qui entretienne cette cage de glace. » conclut-il.
Cela entraîna un silence prolongé, où chacun fut pensif sur ce que cela pouvait impliquer. Il décida de briser ce silence en reprenant.
« Du haut des crêtes de la chaîne, nous avons pu cependant observer la région, même si cela n’était sûrement pas aussi clair que si nous avions été en haut du pic. Nous avons pu remarquer de nombreux groupes d’orcs se déplacer vers le sud-est, dans soit la direction des ruines d’Elehanda ou du Col des Charognards. »
Cela conclut son récit. Les éclaireurs des chevaliers infernaux s’étaient dirigés, eux, vers l’est pour voir s’il y avait de l’activité vers l’ancienne route de Marchefer, la longue route qui passait vers le nord-est et faisait un long détour. Cet ancien chemin passait non loin de Skatunga. Les éclaireurs racontèrent qu’ils avaient vu la nature petit à petit dépérir. Les animaux, au fur et à mesure de leur progression dans cette direction, ne furent plus que des ombres, disparaissant petit à petit. Les arbres se turent avec les kilomètres, les craquements des branches et le vent dans les feuilles disparurent, se taisant à jamais. Le vert du paysage s’effaçaient petit à petit, pour ne laisser que du brun et un orange aux teintes pourpres. Les feuilles tombèrent et une brume de poussière d’argile pris la place du paysage. À partir d’un moment, ils n’eurent pas d’autre choix que de faire demi-tour car ils allaient se trouver à découvert, dans une région hostile et sans aucune connaissance du mal qui régnait en ces lieux.
Les aventuriers firent le lien avec le portail démoniaque que le géant qu’ils avaient interrogé avait mentionné. Leurs connaissances en la matière n’étaient pas suffisamment poussées et il aurait fallu qu’ils puissent voir de leurs propres yeux le spectacle, mais ils avaient le sentiment que les deux éléments étaient liés.
Alors qu’ils terminaient chacun leurs rapports, ils entendirent du bruit à l’extérieur. Le soleil s’était couché depuis quelques temps, mais un groupe de voyageurs semblait être arrivé juste à l’instant. Les échanges entre les gardes en factions et le groupe errant se faisaient entendre dans toute la cour. Éléanore vint aux nouvelles, rapidement suivie des aventuriers. Un groupe voyageant si tard dans une région hostile avait de quoi susciter les interrogations. Il furent introduits dans le fort une fois qu’il fut clair ils venaient pour des raisons pacifiques. À vue d’œil, il s’agissait d’un cercle de druide, mené par un halfelin, qui s’avança pour se présenter.
« Je vous prie de nous excuser pour ce dérangement tardif, mais nous n’étions pas rassuré à l’idée de passer la nuit dehors, avec ce que nous avons pu voir sur la route aujourd’hui. Je me présente : je m’appelle Dane, et je fais partie du Cercle des Pierres de la vallée de Glenwyrm. Il est probable que vous n’ayez jamais entendu parler de notre sanctuaire, car nous ne fréquentons que très peu la civilisation, et nous essayons de garder notre présence aussi discrète que possible. »
« Enchanté Dane, je m’appelle Éléanore d’Argatil, et je suis la Championne de Glenwyrm. Je n’ai, en effet, presque jamais entendu parler de vous. Des rumeurs ont déjà été colportées à mes oreilles, mais je n’ai jamais eu le loisir de vérifier la véracité de celles-ci. Je vous souhaite la bienvenue au Fort de Gel-Dalar… Cependant j’aimerais avoir une idée plus claire de vos intentions. Les dangers nous guettent et j’aimerais rester aussi prudente que possible. »
« Je vous comprends tout à fait. Pour cela, je vais vous présenter mes compagnons. D’abord nous avons Norla, Voja et Qernac qui font partie de notre cercle de Pierres. Mais nous avons également un invité, Azuk, qui nous vient de l’Ordre de la Vague de Teqmil. Il a fait ce long voyage pour en apprendre davantage sur les mystères de l’eau et de son rôle dans la nature. Cela fait quelques mois qu’il est avec nous, et il y a quelques temps, un de nos oiseaux a rapporté qu’une tempête inhabituelle a pris racine au sommet d’un pic non loin. »
« Le Pic des Azlants, en effet. » répondit le capitaine Rega avec un hochement de tête.
« C’est comme cela que vous le nommez à Glenwyrm, en effet. Il est déterminé à aller voir de quoi il s’agit et s’il peut en tirer un certain enseignement de cela. ». Il se gratta alors la tête et ajouta :
« Mais je n’ai pas encore présenté notre ami ici présent. C’est un nomade des terres de Tian Xia. Peut-être désirez-vous vous présenter vous-mêmes ? » fit le druide à son compagnon.
Un elfe d’apparence jeune s’avança. Il était chauve et portait une barbe. Il était habillé d’une tenue légère en tissu avec des symboles étranges. Dans ses mouvements et ses regards, il y avait un mouvement fluide et vivace, une précision et rapidité qui ne semblait pas naturelle. On aurait dit que quelqu’un ou quelque chose l’aidait à se mouvoir. Son accoutrement, ainsi que ses traits, étaient exotiques, car aucun des aventuriers n’avait déjà eu l’occasion de rencontrer des habitants de ce Tian Xia avant. Il s’approcha puis se pencha vers l’avant, le dos droit et les les mains jointes devant sa poitrine. Puis il prit la parole avec un léger accent indéfinissable.
« Merci de votre sollicitude. Je me nomme Maï Xin et je viens en effet d’un clan nomade des montagnes centrales du Tian Xia, une immense région à l’est, où les gens ont les yeux fins comme moi et vénèrent Shizuru, l’Impératrice du Paradis, ou Tsukiyo, le Prince de la Lune. Ayant passé mon enfance à voyager, j’ai décidé une fois devenu adulte, de continuer ma profession de chef itinérant, et également d’aller découvrir les différentes cuisines du monde. Je suis déterminé à faire évoluer mon art en m’inspirant des différentes traditions pour arriver à la cuisine ultime. J’ai résidé quelques temps avec Dane et ses amis, mais ayant entendu parler de ce fort, le fort de Gel-Dalar, j’ai insisté afin de faire un passage par ici. Voyez-vous, ce nom, Gel-Dalar, est présent dans certaines de nos légendes et histoires, et, de nature curieuse, je voulais savoir à quoi cela correspondait dans votre culture. Malgré la distance, je me suis dit que la coïncidence était curieuse. Étant donné que j’allais reprendre mon périple, j’ai décidé de passer par ici. ». L’elfe termina sa présentation avec un sourire poli montrant sa sympathie.
Éléanore fut la première à réagir.
« À dire vrai, je ne sais pas exactement pourquoi cet endroit s’appelle le Fort de Gel-Dalar. Je suppose qu’il s’agit de quelqu’un qui a donné son nom à la place forte, mais je n’ai pas vraiment eu une éducation classique. Peut-être que des historiens des Chevaliers Infernaux pourront vous aider. »
Il y eu un léger haussement d’épaules dans l’assemblée. Il semblait que personne ne savait qui était de Gel-Dalar. Maï Xin répondit alors :
« Ce n’est pas grave, je trouverai probablement cette information dans mes pérégrinations. »
Éléanore reprit :
« Quoi qu’il en soit, soyez les bienvenus ici. J’aimerais encore discuter un peu avec vous, maître Dane, car vous avez peut-être des informations qui nous seraient bien utiles en ces temps dangereux... »
Et l’état-major se dispersa, laissant les aventuriers et Maï Xin en conciliabule plus réduit. Vidar se lança alors :
« Nous n’avons pas encore eu le temps de nous présenter. Je m’appelle Vidar, du clan Odeson. ». Et il s’avança vers l’elfe pour lui faire une poignée de main vigoureuse.
« Marduk Rabadashur, du Qadira de l’Est. Vous êtes peut-être passé par là durant votre long périple. »
Drark et Baltazar se présentèrent alors, n’ayant pas grand-chose à ajouter. Chacun entreprit alors d’expliquer avec davantage de détails ce qui les poussait à venir dans le nord, dans ces montagnes hostiles, et ainsi à risquer leur vie : la vengeance d’un clan dont l’honneur avait été souillé et dont le sang avait été versé, la rédemption d’une famille qui avait commis l’impardonnable, la recherche de son passé et de sa mémoire, la découverte du monde et des incroyables possibilités de l’alchimie.
Maï Xin, devant ces aventuriers qui parlaient à cœurs ouverts, se sentit en confiance et décida de franchir un pas.
« À dire vrai, j’ai omis une partie des informations tout à l’heure concernant Gel-Dalar. J’ai été envoyé dans ce pays à la recherche d’un joyau, appelé Orbe de Gel-Dalar. Et bien que je n’ai effectivement pas beaucoup d’information sur le créateur ou l’objet que je cherche, je sais que cet orbe est un artefact puissant, dont il émane une magie qui enchante la vie aux alentours. Pour la survie de ma tribu, il est important que je le ramène chez moi. »
Vidar avait un bon sentiment sur cet elfe. Il paraissait jeune, naïf et plein de bonnes intentions. C’était peut-être ses ancêtres qui lui faisait une petite tape sur l’épaule pour lui faire comprendre qu’ils avaient devant eu une personne de confiance, et il décida d’aller dans ce sens. Dans leur situation où les ennemis semblaient s’additionner de jour en jour, les nouveaux alliés étaient toujours bons à prendre. Il répondit, en se lissant la barbe :
« Si vous le désirez, vous pourriez vous joindre à nous. Je pense que nos chemins mènent aux mêmes endroits. Nous allons investiguer la région à la recherche d’Ulgan, un orc qui guident les Crocs d’Obsidienne. Il est fort probable que nos explorations vous permettront de trouver réponses à vos questions. Notre prochaine étape serait le Pic de Azlants. La tempête qui s’y trouve nous semble suspecte, et nous pensons qu’il s’agit peut-être d’un premier élément de réponse. »
Maï Xin réfléchit quelques secondes, puis répondit avec enthousiasme :
« La région me semble trop dangereuse que pour voyager seul. Je n’ai actuellement pas de piste vraiment tangible, donc commencer par là n’est pas une mauvaise idée. Faisons route ensemble. »
Le groupe d’aventuriers allèrent dire leurs intentions à Éléanore et au reste de l’état-major. Durant la discussion, Marcus se proposa pour les accompagner avec son escouade : ils avaient déjà fait cette route, et il ne voyait pas vraiment d’autre endroit où ils pourraient être plus utiles. Les aventuriers acceptèrent de mauvaise grâce, même si ce n’était probablement pas le cas, ils avaient l’impression d’être surveillés. Azuk, évidemment, les accompagneraient. Il voulait étudier ce blizzard de plus près et il pourrait sûrement leur être utile grâce à sa magie élémentaire de l’eau.
Ils allèrent dormir tôt, partageant néanmoins un petit verre et une pipe aux arômes de Vieille Feuille. Les aventuriers avaient terminé leur réserve, mais Maï Xin savait que ses compagnons druide en possédaient un peu. Ils nouèrent ce nouvel embryon d’amitié autour du feu, discutant des différences culturelles entre l’Avistan, le Garund et le Tian Xia.
Le lendemain matin, ils prirent la route vers le nord-ouest, suivant la crête de la montagne sans pour autant voyager à découvert. Les Pénitents avaient remarqué du mouvement dans les forêts en contrebas, il fallait donc rester vigilant.
Après une journée de voyage, ils parvinrent à proximité du blizzard. Après concertation, ils furent d’accord pour dire qu’il était beaucoup trop dangereux de s’aventurer dans le blizzard durant la nuit. Ils pourraient se perdre en chemin, tourner en rond, et n’importe quel chute de neige, glissement de terrain, avalanche ou danger similaire pourrait signifier la perte total de quelqu’un dans la pénombre hurlante de la tempête.
Ils montèrent le camp à distance de la tempête, puis décidèrent du tour de garde. Les aventuriers décidèrent qu’ils allaient diviser cela en tiers. Maï Xin prendrait le premier, Vidar le second, et Marduk, accompagné de Marcus, prendraient le troisième. Pendant la nuit, le cinétiste et l’oracle purent entendre la montagne gronder, comme reprenant en chœur d’une voix rauque les plaintes du vent et les amplifiants au cœur de la montagne. Cela leur rappela le fait qu’ils étaient non loin des Mines de Calambion, et qu’il faudrait peut-être y faire un tour sur le chemin du retour.
Quand le tour de Marduk et Marcus fut arrivé, les deux hommes se mirent au coin du feu, leurs sens en alerte. Le temps passa et comme tout semblait calme, le kéleshite décida d’un peu discuter avec son compagnon de voyage. Ils discutèrent d’abord du monde, le champion évoquant sa terre natale, sa culture et ses passé. Il décida de s’ouvrir et de montrer une attitude bienveillante, tout en laissant la porte ouverte à son interlocuteur afin de lui laisser la place de partager s’il en avait envie. Marcus, étant Pénitent, n’avait jusqu’ici pas révélé grand-chose sur sa vie. Le but étant de laisser son passé derrière soit il avait été jusqu’ici discret. Cependant, Marduk commençait à cerner sa personnalité. Il sentait, au fond de lui, que Marcus avait commis des choses d’une importance majeure, car cela faisait des années qu’il faisait partie de l’ordre, et qu’il ne l’avait toujours pas quitté. Ses fautes devaient être grandes, et elles demandaient alors un paiement d’une grandeur appropriées.
En outre, Marcus semblait être un grand guerrier. Il avait une assurance qui transpirait l’expérience et les épreuves difficiles. Il devait avoir été quelqu’un d’important dans la région. Marduk se posa même la question de savoir s’il ne s’agissait pas de Rudri, mais cela lui semblait peu probable. Il aurait été reconnu à Glenwyrm.
Au cours de la conversation, Marcus prit finalement la parole pour dire :
« J’ai entendu parler de votre prestation devant le Conseil des Cinq. Sachez que j’ai été touché. Je pense qu’Éléanore est quelqu’un de bien, qui mérite notre soutien. Elle est jeune, puissante et courageuse, mais elle est également en proie à des doutes. Son manque d’expérience est une faille qui peut être exploitée par ses ennemis, et il est important que nous puissions la guider dans les moments difficiles. »
Marduk prit une seconde pour réfléchir à ce qui venait d’être dit. Bien que le Pénitent ait été explicite sur le fait d’épauler Éléanore et les difficultés qu’elle devrait affronter, ce qui intéressa encore plus le sarenrite était la partie implicite du discours de Marcus. Il venait de dévoiler sa position sur la guerre des dragonniers. Marduk reprit alors :
« Vous savez que je suis un champion de Sarenrae, déesse de la rédemption et du soleil. Si je comprends bien, nos voies ne sont pas si éloignées, entre Pénitents et sarenrites. Est-ce que je me trompe ? » dit l’ancien soldat sur un ton neutre.
« Vous avez tout à fait raison. Il existe d’ailleurs de nombreux Pénitents qui vénèrent votre déesse. Cependant, nous ne sommes pas forcément tous attirés par la Fleur de l’Aube comme vous. J’avoue l’avoir moi-même prié de nombreuses fois. »
« Cela fait longtemps que vous faites partie des Chevaliers du Pardon, n’est-ce pas ? »
« La durée est toujours proportionnelle à la gravité des faits... » répliqua Marcus avec un ton grave. Il avait les yeux perdus dans les flammes du foyer. Une expression de profonde rêverie mélancolique s’installa sur son visage.
« Selon ma déesse, toute personne qui cherche la rédemption avec un cœur honnête la trouvera, un jour où l’autre. Tant que vos intentions sont pures, rien ne peut vous empêcher de trouver la paix, aussi long que soit le chemin. Le Pénitent le regarda alors, puis sourit avec une certaine tristesse. »
Marcus prit quelques secondes à répondre, tandis que seule le crépitement des flammes se faisait entendre dans la nuit, avec un fond sonore du blizzard au loin.
« Merci, Marduk Rabadashur. »
Le lendemain matin, alors que le groupe levait le camp, il vint à Marduk une idée. Il voulait profiter des quelques minutes de temps mort et du lever de soleil pour réaliser un rituel. Il appela Vidar et Maï Xin pour venir l’assister, et il fit exprès de s’éloigner des Chevaliers du Pardon afin que cela ne soit pas révélé. Bien qu’il avait une certaine sympathie pour eux, le champion ne leur faisait toujours pas entièrement confiance.
Il disposa des bougies en cercles concentriques, à l’abri du vent dans une petite clairière de buissons. Il sortit son encens et d’autres matériaux pour exacerber les effets de son invocations, puis demanda à ses compagnons de l’assister dans sa tâche. Une profonde litanie fut entamée, qui se mêla petit à petit avec le souffle du vent dans les bruyères et les arbustes. Un chemin fut tracé, petit à petit, par le roulement des voix intérieures, pour permettre à l’être que Marduk tentait d’appeler de se présenter. Après quelques minutes, les écritures jaunes et dorées au sol se mirent à briller, et un être se matérialisa au centre du cercle. Il était auréolé de lumière et de grandes ailes blanches sortaient de son armure scintillante. Il avait les yeux brillants comme le soleil, qui semblaient voir la vérité sur le monde et dans le cœur des hommes. On aurait dit qu’il pouvait voir le passé, le présent et le futur, même si cela n’était pas vrai.
« Que souhaites-tu, Marduk, fils d’Aruduk ? Pose-moi sept questions, et j’y répondrai… dans la mesure du possible. Sache que je ne peux te répondre que par « oui », « non », « probablement » et « je ne sais pas. ». Le reste, tu devrais le découvrir seul. »
Les aventuriers réfléchirent quelques secondes, puis la première question fusa :
« Est-ce Marcus est en réalité Rudri ? », demanda Marduk.
« Non ».
« A-t-il participé à la guerre contre les Dragonniers ? » enchaîna le champion.
« Oui ».
« Faisait-il partie du camp des dragonniers ? »ajouta Vidar.
« Non. »
« Mais… était-il un dragonnier ? »
« Oui. »
Les sourcils se levèrent. Ça, c’était une grosse révélation.
« Était-ce lui qui a brûlé le village sur ordre du Conseil du Dieu Griffu afin de déclencher la guerre ? ».
« Non. »
Les aventuriers se concertèrent, car ils avaient l’impression de s’être un peu trop focalisé sur Marcus. Il était important de s’attaquer aux autres problèmes plus importants.
« Ulgan est-il dans ces montagnes actuellement ? » demanda le nain.
« Oui. »
« Baltazar va-t-il mourir s’il accomplit sa quête de tuer toutes les personnes sur la liste ? »
« Probablement. »
Un silence se fit. L’ange ne partit pas tout de suite, comme pour évaluer l’impact de cette réponse sur les aventuriers. Puis il disparu après avoir souhaité bonne chance d’un petit geste de tête. Maï Xin ne saisissait pas tout à fait ce que cela impliquait, mais il sentait que cette dernière question avait beaucoup d’importance pour ses nouveaux compagnons. Une question restait en suspens dans les têtes des aventuriers : que se passerait-il si Baltazar ne tuait pas ces personnes?
Le rituel finalement clôturé, les aventuriers rejoignirent les Pénitents, la tête dans leurs pensées, le hurlement incessant des bourrasques les isolant en plus dans leurs réflexions.
La compagnie improbable se mit alors en route vers le sommet du pic. Peu avant le départ, Marcus, sur le ton de la confidence, demanda aux aventuriers de préserver autant que faire se peut ses trois autres compagnons dans le cas hautement probable d’un affrontement.
« Ils sont braves et sur la bonne voie, mais ce sont loin d’être des combattants expérimentés, et personne ne sait vraiment ce qui nous attend là-haut. Aussi je vous demande humblement de participer à mon devoir de les garder en vie en cas de problème ».
Les compagnons acquiescèrent et il fut entendu qu’ils entameraient la montée sur une formation en quatre lignes successives : Vidar et Marduk seraient l’avant-garde, suivi par Marcus, Mai-Xin et Azuk, puis des trois autres chevaliers du pardon. Drark et Balthazar, quant à eux, fermeraient la marche : le gobelin avait de toute façon besoin de distance en cas de pépin, et l’iruxi de pouvoir s’effacer discrètement pour mieux frapper depuis les ombres ensuite.
La tempête faisait rage, mais l'azarketi maintenait une bulle de protection, maîtrisant l'élément de la glace pour préserver au maximum ses compagnons de voyage.
À mesure qu'ils progressaient, le blizzard s'intensifiait après plusieurs dizaines de minutes d’ascension vers le pic, Marduk ne pouvait s’empêcher de penser que la surprise presque enfantine d’enfin découvrir la neige était passée depuis bien longtemps. La barbe gelée, il se tourna vers son compagnon :
« Vidar, je te le dis : heureusement que je vénère la déesse du soleil et du feu. »
L’oracle lui répondit par un sourire entendu. Les conditions étaient en effet loin d’être idéales : être engourdi par le froid était une chose, mais la visibilité limitée en était une autre, et les rendaient vulnérables en ces lieux inconnus. Il jeta un oeil en arrière : les trois compagnons derrière lui ne semblaient pas incommodés le moins du monde par les conditions, mais en effet, les trois chevaliers du pardon semblaient bien penauds et grelottaient péniblement sous leurs capes. Un peu plus loin, Balthazar avait l’air de s’en sortir correctement, mais Drark avait de la neige jusqu’à la taille. Vidar était sûr de pouvoir l’entendre jurer jusqu’ici.
Ils continuèrent bon gré et mal gré et après plusieurs heures, Marduk s’arrêta net :
« Quelque chose ne tourne pas ro… »
Avant même qu’il ne puisse terminer sa phrase, l’avalanche se déclencha. C’était un glissement relativement mineur dans la grande échelle des choses, certes, mais ce fut suffisant pour déséquilibrer une partie de la compagnie. Le champion put se jeter in extremis derrière un rocher et après quelques instants de bruits sourds assourdissant, toujours dos à son abri de fortune, il put faire une évaluation rapide de la situation : Vidar n’avait glissé que de quelques mètres, Marcus et MaÏ Xin étaient toujours là aussi ; il ne voyait pas les autres.
Avant d’envisager le pire, Il ferma les yeux, posa sa main sur le symbole de Sarenrae qui bardait son plastron, et étendit sa perception pour ressentir leurs auras. Ils étaient un peu plus bas, sonnés mais entiers. Il se réjouit que Balthazar fût une créature à sang-froid et sourit à l’idée que Drark, à l’inverse, devait probablement avoir le sang très chaud à l’instant présent.
« CONTACT ! »
Le hurlement de Vidar le sorti de sa concentration : il se retourna. Deux élémentaires de glace se dressaient face à lui : le premier était un amalgame gigantesque de glace aux proportions vaguement humanoïdes. Le second, quant à lui, évoquait un grand serpent ou peut-être un dragon à échelle réduite.
Vidar fut sur eux en instant en se déplaçant à travers l’éther, le marteau brandit. Hélas, il avait mal calculé l’inclinaison de la pente et arriva déséquilibré dans le dos du géant de glace. Ni une ni deux, Marduk s’élança et vint s’interposer pour garder l’attention de l’élémentaire sur lui plutôt que sur l’oracle. Ce fut un succès relatif car le monstre de glace frappa immédiatement le nain toujours en train d’essayer de récupérer une posture stable.
Un picotement dans les gencives du champion lui indiqua une perturbation magique dans l’air, et il aperçut Maï Xin s’élancer en ouvrant des portails miniatures vers d’autres plans. Il se déplaçait sur la neige avec une vitesse déconcertante et de ses mains sortaient des éclairs qu’il dirigeait vers les deux ennemis.
Marcus fut plus lent à rentrer dans le feu de l’action. Il avait dégainé une lame richement ornée qu’il semblait être en train d’imbiber d’énergie magique un peu l’écart. Il manipulait un autre objet difficilement identifiable dans l’ardeur des combats.
Les deux élémentaires frappaient durs et semblaient en vouloir particulièrement à Vidar. Alors que ce dernier commença a préparer une incantation, le géant de glace l’interrompit immédiatement d’un revers contondant. Marduk se repositionna pour se placer à côté de son allié, essayant de parer pour lui les coups qui ne cessaient d’arriver et soignant son ami autant que faire se peut.
Maï Xin, quant à lui semblait insaisissable, passant à travers les ennemis pour leur infliger des dégâts élémentaires, alternant entre les bourrasques et la foudre, les harcelant continuellement.
La lame finalement chargée, Marcus entra dans le combat. Dans le feu de l’action, Marduk ne put s’empêcher de noter qu’il se déplaçait à une vitesse et une aisance qui ne semblait pas totalement appartenir à l’espèce humaine, et se rapprochait en réalité de leur nouvel ami elfe. Les coups d’épées du chevalier du pardon raclaient sur la peau glacée des ennemis et il était évident qu’il était effectivement un combattant plus qu’aguerri.
Après quelques minutes de combats enneigés, rythmés par les assauts constants de Mai-Xin et de Marcus, et les coups sur le bouclier de Marduk, les deux élémentaires finirent par succomber, s’écroulant en tas de glace inanimés et désormais inoffensifs.
Vidar avait encaissé le plus de dégâts et la vapeur émanant de lui contrastait avec le blizzard environnant. Il s’était adossé à un rocher pour reprendre son souffle et le champion s’était déjà approché pour lui prodiguer des soins, tandis que Mai-Xin et Marcus partirent voir si leurs autres compagnons s’en sortaient un peu plus bas.
« Hé Marduk ! » lança Vidar entre deux halètements.
Le champion était en train de canaliser des énergies divines dans ses mains et leva un sourcil vers le nain pour lui montrer qu’il avait son attention malgré tout.
« Bordel, moi aussi je déteste la neige. »
Date du Rapport
10 Jan 2025
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