General Summary
Les ambassadeurs se succèdent à un rythme effréné. A peine ai-je le temps de coucher sur papier les évènements du jour que les suivants s’enchaînent – à croire que véritablement ma cervelle est trop légère pour garder tout en tête. Voici, j’espère de façon à peu près cohérente, les différentes ambassades reçues entre le 15 et le 17 Aout 819.
Parwazee et ses tire-laines
Matriarche Frarah du Convoi Padida
A la mi-journée, la caravane Rasvan nous a reçu. Ils avaient installé leurs tentes autour de leur relique, une caravane massive qui domine tous les chapiteaux. Mis à part l’abondance de chevaux et jeunes Rasvan armés, leur campement était comme je l’imaginait : chargé d’étoffes luxueuses, de chants et des volutes de leur thé épicé. Presque… nostalgique. Si leur peau est à peine plus colorée que celle des humains, ils savent tisser des plumages fabuleux. Chez des éréfins, une telle abondance de couleurs frôlerait l’obscène ; mais là, ça semblait vivant, presque naturel.
A l’opposé de l’attitude presque guindé qu’ils avaient face à nous. Clairement, ils n’ont pas l’habitude de recevoir tout en étant reçu, en tout cas pas ainsi. Les Anciennes ont toutefois marqué l’honneur rare qui leur est fait, en ouvrant les porte d’une ville à un convoi Rasvan. Mon cœur s’est serré pour eux, pour leur périple, et pour les tourments qu’ils risquent de subir ici malgré nos efforts. Un peu moins pour les marchandages douteux que Nico a pu entrapercevoir dans les profondeurs du campement.
Nous avons reçu un accueil assez franc de la Matriarche, Frarah. Elle nous a fait servir le thé, puis a invité Parwaaze à célébrer notre réunion d’une prière. S’agit-il d’un rituel habituel, ou d’une façon de sonder l’Archonte qui les avait invités ? Elle semblait satisfaite, en tout cas, puisqu’elle a invoqué la bénédiction de Shamim et nous a présenté des cadeaux. De belles pièces, par ailleurs, de gout sans être tapageuse : une selle, des outils de navigations, un coffre de graines rares sûr de ravir Nico, et un abacus en ivoire particulièrement travaillé.
Bien qu’âgée, la matriarche tient son rang et ses consœurs. J’apprécie son ton, direct mais ferme. Peut-être aussi le fait que, même si elle reconnait à Parwazee le titre d’élu de Sarahbdim, elle a démenti de façon claire l’existence même d’un quelconque temple aux Premiers Nés, à Fontambra ou ailleurs. Parwazee apprendra peut-être ainsi qu’on ne s’improvise pas Matriarche – quoique, n’est-ce pas ce que chaque Archonte tente de faire ici, à sa manière ?
De but en blanc, la Matriarche demande ensuite que nous protégions certains lieux sacrés, et que nous n’apportions aucune aide aux jeunes Rasvan en pèlerinage. Parwaaze semblait vouloir objecter à cette dernière demande – peut être voudrait il recruter ces jeunes gens pour ses bonnes œuvres ? Mais l’Archonte des Voix peut difficilement aller contre la volonté même des peuples qu’elle tend à protéger – et encore moins celle du Concile assemblé.
Plus diplomate, Nergui s’est simplement enquis des rites à donner aux Rasvan morts à Ondenera. Parwazee est semble-t-il tout aussi mutique sur ce point que tout les autres aillant avoir avec sa foi. La Matriarche n’a pas été plus claire, même si elle a souligné qu’il était important de tenir les mourant éveillé, pour surtout éviter qu’ils ne meurent dans leur sommeil. Un point douloureux pour Parwazee, ai-je cru percevoir… Que les Premiers Nés nous préservent de ses manigances, s’il décide de créer une hérésie sur nos terres j’en serait peut-être le dernier mis au courant.
Pour l’heure, la Matriarche d’un convoi prestigieux semble respecter, ou du moins tolérer les actions de Parwazee. Je sais bien peu sur ce qu’elle est prête à accomplir en échange de ses exigences, même si sa présence augure de bonne chose pour le commerce de la ville. D’autres caravanes sont sûres de suivre, et faire perdurer un échange prospère… Tant que rien ne vient troubler cette alliance.
Par la suite, j’ai pu échanger avec certains des Anciens du convoi. Leur logement, ou plutôt l’espace qui leur a été alloué, semble convenir, même si tout ce monde sera vite à l’étroit dans la cité. Ils connaissent nos lois, et les respecteront peut-être. Plus gênant, ils ne peuvent s’empêcher de mépriser les Sérènes pour leurs manières tapageuses. S’ils savaient combien eux même me paraissent extravagants, ainsi orné de toutes les teintes du jaune de l’aube au rouge sang… Mais je n’ai fait que rester silencieux face à leurs doutes – il n’est pas ma place de prendre position.
Moineau entre les pattes d’une Lionne
Vice-Reine Aatifa, envoyée de la gynosphynx Lathia
Au matin, j’étais parti profiter du calme pour faire un tour de la ville. Assez rapidement, des gardes m’ont arrêté, paniqué de l’arrivée d’une vielle femme s’affirmant comme la vice-reine Aatifa. Vu la crainte que ce nom évoque au Concile, vu la terreur dans les yeux de ces Dévôts désemparé, j’étais piqué au vif. Et, puisqu’aucune autre Archonte n’était présent, je suis venu accueillir la Vice-Reine. Maudite soit ma curiosité…
Même sous forme d’une vielle femme, il se dégage d’elle la présence malsaine d’un félin – ou d’un démon, pour ce que j’en sais. Son ton était déjà suffisant pour me faire frissonner. Ses paroles étaient pires encore – tendant soit à trahir les secrets d’Ondanera aux chalands, soit menaces ouvertes de me dévorer vif. Terrifié, tant par mes potentiels impairs diplomatique que l’idée de finir lié à elle comme les autres Archontes, j’ai fui notre première confrontation. Je n’ai presque pas de honte à l’admettre : C’est dire la crainte qu’elle m’inspire.
C’est seulement quand les autres Archontes furent levés que j’ai rejoint l’attroupement qu’elle a créé au centre de notre cité. Confiante en ses pouvoirs, Atifa s’est présentée seule, se payant même le luxe d’envoûter certains de nos gardes. Nous ne lui avons pas déplu, semble-t-il… Elle dit attendre avec impatience la couronne promise, et ronronnait presque en admettant avoir dévoré les esclaves qui lui avaient été envoyés. Balquis finit par canaliser la Vice-Reine – Et à jamais je reste admiratif de son courage.
Peut être est ce cette rencontre qui m’avait désarçonné. Peut être simplement la pression montant de l’échange des tribus et de la fête annuelle qui nous guettent. En tout cas, j’ai cru bon dévoiler aux Archontes le don de Sémiramis, et d’offrir ses augures au Concile. J’avais notamment consulté les astres au sujet de l’Imier du Double Trésor, craignant une attaque pendant la nuit ou un assaut sur le tribu dû au Califat. J’ai donc fait part de mes prédictions : L’Imier est rancunier envers le Calife, qui n’aide pas sa nation à combattre le Despotat. Néanmoins, il s’est finalement résigné à payer. Comme j’aurai dû m’y attendre, ils ont répliqué avec circonspection. Méfiance. Hostilité, pour certain. Et une bonne dose de curiosité mal placée – en particulier de ceux qui sont si souvent des compagnons d’armes, et non seulement d’office.
Devrai-je imiter Nergüi, et garder mes compétences pour moi-même ? Lui qui peut désormais modeler la pierre s’est bien gardé d’en informer le Concile. Nul doute qu’il gardera secret les dons que lui offrira Ahjvandi, une fois qu’il aura lié son pacte avec elle. Aurai-je dû mentir, prétexter qu’il s’agissait d’un sortilège appris comme eux au fil de nos voyages ? Après tout, jamais ils n’ont questionné mes quelques sorts, même si j’en fait un usage de plus en plus fréquent.
Mais quel intérêt, si j’ai vocation à guider la cité ? J’œuvre à la transparence, même si ce n’est pas la voix choisie par d’autres Archontes. J’aime à penser que c’est cohérent avec ma charge, là où la leur peut nécessiter plus de discrétion. J’espère seulement que leurs questions venaient véritablement d’un souci pour la cité, et non une menace pour ma Protectrice. L’idée m’a… énervé. J’ai été, des dires des présents, particulièrement acerbes dans mes réponses à Nergui. Tout aussi agressif que lui… voir plus. Une chance que cette joute eût été verbale, ou ma colère m’aurait mené à des actions bien plus regrettable encore.
Muslih a calmé les choses, et profité pour mettre quelques limites aux curiosités de chacun. Ainsi, tout comme je ne peux sonder les pensées de mes confrères, nous ne pouvons enquêter les uns sur les autres. Même si cette directive n’empêchera certainement pas Sajaa ou Nergui de s’immiscer là où ils n’ont pas lieu d’être, au moins devront-ils se faire discrets.
Honteux de mes excès d’humeur, j’ai voulu retrouver un semblant de sérénité. A peine le semi-concile terminé, que j’ai repris les cieux.
Bisque de Balquis
Ambassadeur Corrus, Seigneur du 7e banc et envoyé de la Rani Kharista
J’étais en plein vol alors que j’ai entendu une clameur sur les plages, au sud de la Cité. Quatre gigantesques crabes y avaient émergé, alors que des dizaines de leur congénères plus petits envahissait la petite plage. Je me suis posé sur le sable chaud, et un crustacé titanesque est sorti des flots. Sa carapace seule était plus haute qu’une maison ; et son corps entièrement strié de nacre rosée, pulsant sous chaque goutte d’eau.
Par réflexe, j’ai résisté à sa première tentative de communication. Sa forme ne lui permet pas la même parole que nous, aussi passe-t-il directement par l’esprit. Il me l’a indiqué directement, en posant, aussi délicatement qu’il lui est possible, une pince à ma tempe. J’appris plus tard que Meneo et ses Dévôts m’observaient depuis une plage proche, atterrés… Mais le contact n’était pas offensif : L’envoyé des profondeurs s’est contenté de prononcer directement dans mon esprit le terme : « Ambassadeur ». Trop méfiant, sûrement, je lui ai plutôt proposé d’ouvrir son esprit à moi.
Il a accepté. En sondant sa psyché, j’ai compris pourquoi : Sa maîtrise des arts psychique est simplement phénoménale. Il lui était aisé de cacher ou présenter ses pensées malgré mon sort – et, de toute façon, son esprit était tellement différent du miens que je peinais à décrypter ses visions. Tout se fait si lentement, si parcimonieusement dans cette énorme carapace, que je peine à me souvenir du début quand il arrive à la fin. Heureusement pour moi, il ne semble pas s’attacher à l’étiquette ou au protocole, et en vint directement au fait.
Il s’est présenté comme Corrus, Seigneur du 7e banc et ambassadeur de Kharista. J’ai été mander les Archontes, que j’ai prévenu de sa façon de procéder – puis nous avons conversés, quoique Nergui ait semble-t-il choisi de maintenir son esprit fermé. J’espère, encore une fois, que ses petits secrets ne nous menacent pas tous, vu la ferveur avec laquelle il s’y agrippe. Corrus a demandé l’heure des festivités. Puis, lentement, il a présenté le cadeau de la Rani Kharista : Un énorme coquillage en forme de corne, empli d’un liquide rose et qu’il a désigné comme « Corail Royal ». Balquis a entamé des premiers contacts, sûrement terrifiée à l’idée de devoir accommoder cet ambassadeur démesuré à une fête déjà fort chargée. Nico a transmis à ses chantres et pêcheurs l’interdiction formelle de manger des crustacés pour la durée des festivités, tandis que Nergui soulevait d’un sort le massif présent et l’embarquait en salle du Trésor. Pensant qu’une telle visite serait à même de l’intriguer – et craignant une confrontation accidentelle – j’ai volé auprès des Némériens. J’ai pu m’entretenir avec Konstantin, qui, loin de son habituelle curiosité, a choisi de nous mettre en garde. Selon un mythe ancien de sa nation, une armée assiégeante aurait saisi une cité par la ruse, présentant à ses murs un cadeau gigantesque au sein duquel étaient dissimulé ses meilleurs guerriers. Est-il méfiant du Corail Royal ? Ses mots ont leur sagesse, je tenterais de les garder à cœur.
L’ombre d’une justice aveugle
Yusuf Al-Aym, Wali de Riyad et envoyé du Calife
A peine réuni en Concile que nous est annoncé la délégation du Calife. Nergui a usé de ses illusions pour finir la mosaïque des Terres de Feu, qui fait le sol de notre salle d’audience. Je vois mal l’utilité de sauver de telles apparence, quand face aux Cités Dorées du Califat Ondanera fait de toute façon bien frêle figure… Mais notre Archonte du Sépulcre saisi sûrement mieux que moi la psyché de nos invités.
A noter d’ailleurs que notre Concile était incomplet. D’une part, Marco était encore trop secoué par sa mort et transformation. Par ailleurs, nous étions tous rassuré de découvrir que Saaja avait trouvé mieux à faire que d’être là. Comme pour contrebalancer ces absences, Nawaal, Konstantin et Andronicus nous rejoignent pour accueillir les envoyés du Califat.
C’est le capitaine Shunar Laysham, connaissance des autres Archontes, qui fit les présentations. Il annonça d’abord le Wali de Riyad, Yusuf Aym, puis le Kadi de la même ville, Izahl Al Shuqayq. Le premier est un humain bien portant, affable et bien trop souriant, qui vint étreindre Nergui. Le second est son contraire : un homme sévère aux yeux embués d’or, orné d’un étrange bijou qui s’enroule à sa tempe et muré dans un silence pesant. Le Wali avait monté les marches qui mènent à nos sièges sans ménagement pour saisir celui qu’il dénomme le « Promis ». Sans plus de formalité, il félicita Nergui pour ses fiançailles – ce que ce dernier accepta avec un stoïcisme remarquable. Encore une fois, loués soient les étoiles que Sajaa fut absente cette après-midi-là.
Avec un paternalisme marqué quoique bienveillant, il admira le pittoresque de notre Cité – et échangea quelques piques à demi voilées avec Konstantin sur les qualités d’Hadur et d’Astelia, et de leurs cités respectives. Leur combat de coq terminé, le Wali exigea de connaître les détails exotiques de nos activités en Terre de Feu. C’était, je dois l’admettre, assez divertissant de lui conter la présence de Corrus, ambassadeur Bernard l’Ermite.
Rencontre avec les Chantres d’Ondanera
Une fois terminé l’accueil des envoyés Hadurshan, nous avons reçu les Chantres du Domaine d’Ondanera. J’ai pu faire la rencontre de Nyfre, la richissime Chantre de Tenero venu défendre ses intérêts au Concile, et de Pavelion, elfe Sérène élu par Nico pour être Chantre de Bazaran. La première a fait grande mention des étoffes teintées qu’elle présentait en cadeau au Concile – et du soutien que lui porte Parwaaze. Ça ne l’a pas empêchée d’être entièrement ignorée par Nergui, alors que ce dernier quittait le Concile et qu’elle lui faisait sa plus belle révérence. Et ce, alors que la Tiefeline porte jusque sur sa peau la couleur de notre cité…
Pour le reste, nous avons eut droit aux plaintes de Malva, Chantre de Maiali, qui refuse d’accepter de nouveaux arrivants et déplore les méthodes de sa collègues Nyfre. N’ayant pas gout pour ces enfantillages, j’ai laissé les Chantres à Parwaaze et Nico pour m’intéresser à la vie de nos nouveaux arrivants. En ville, la place manque pour accueillir tout le monde. L’arrivée de Corrus a encore resserré l’espace disponible… Mais, pour ceux qui peuvent poser leur étal, le commerce est florissant. Ce, tant pour les marchands tout juste arrivés que pour les Némériens à quelques coups de rame de la cité. J’en ai profité pour faire l’acquisition d’un costume bleu cobalt à ailerons aciers accentué d’or, d’un brocart sarcelle et de plusieurs voiles turquins... Sûrement, j’aurai l’occasion de les porter pendant les prochains évènements. On raconte même qu’un marchand particulièrement connecté est capable de proposer des produits issus tout droit de la Sérénissime – et pour des prix défiants toute concurrence.
Alors que je parcourrais les ruelles, un des soldats du Sultanat m’a confié un message de Nep-Ra. Le Sultanat participera aux festivités, et désire récupérer la relique de leur Adoratrice. J’ai transmis à Balquis, supposant qu’elle, son frère et peut être Nergui sauraient comment procéder pour transférer le volumineux objet.
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