Session XXXV : Sous la canopée fongique
General Summary
Le groupe de mercenaires décida de se rassembler au centre de la pièce. Ils avaient inspecté les lieux et commençaient à avoir l’impression d’avoir inspecté l’entièreté du sanctuaire. Ils s’assirent sur ce qui restait des bancs. Ils commencèrent à mettre en commun toutes les phrases, mots et autres aphorismes concernant le dieu de la magie.
Ils commencèrent par se rappeler ce qu’ils cherchaient : une série de huit chiffres. Aucun des indices trouvés ne faisaient référence à des chiffres. Cependant, ils avaient pré-senti une sorte de message caché. La formulation des aphorismes et autres phrases poétiques avait quelque chose de particulier. Ils se mirent à compter les pieds. Ikit avait trouvé un livre sur la poésie magique et il se mit à chercher dans ce sens. Malheureusement, rien ne semblait vraiment ressortir de cette analyse. Chaque fois qu’ils semblaient trouver un décompte qui se rapprochait d’une réponse à huit chiffres, un des éléments ne collait pas. Il fallait chercher dans une autre direction. En regardant de plus près, Elaron remarqua qu’ils étaient occupés à chercher des ressemblances entre toutes les phrases, alors que toutes n’avaient pas la même structure langagière. Il regroupa les phrases , « L’âme sûre ruse mal », « L’âme des uns n’use de mal », « Sévère, mal à l’âme, rêves », puis « Engage le jeu que je le gagne », et enfin « Rions noir » qui se trouvait sur la porte enfoncée par les ouvriers. Cela semblait avoir plus de sens, sans qu’il ne sache vraiment pourquoi. Virgile, en calculateur méthodique, recommença alors le processus de comptage par groupe de phrases. Mais comment savoir alors quel groupe serait celui à suivre ? Netharius avait le sentiment que toutes les formules avaient un intérêt pour résoudre l’énigme qu’ils avaient devant eux. Ikit, qui avait l’instinct le plus développé sur la poésie, fit alors une remarque :
« Ces phrases, « », elles peuvent se lire dans les deux sens non ? »
« Hmm… »
« Mais oui, ce sont des palindromes ! Des phrases qui ont des lettres organisées de manière symétriques. Un peu comme Néthys, qui est divisé en deux, avec un axe de symétrie, le côté gauche est le reflet du droit, avec la seule différence que l’un est sombre et l’autre illuminé ! »
« Intéressante découverte, en effet, mais je ne vois cependant pas comment cela va nous aider pour le cryptex... »
Après un moment de réflexion, Virgile rétorqua :
« Peut-être que les huit chiffres du cryptex, ne sont en réalité que quatre chiffres. Qui se répètent. Disposés en miroir. ».
« Il ne reste plus qu’à trouver un indice concernant les chiffres dans nos phrases. », ajouta Netharius.
« Les quatre essences de la magie, cachées dans un lieu neuf. »
« Ce qui nous fait quatre, un et neuf, mais cela ne donnerait que six chiffres, et non huit. »
La mention assez claire des chiffres dans la phrase, la position du cadran solaire au centre de la pièce, tout cela indiquait aux mercenaires que cela devait probablement être cela, mais une pièce du puzzle manquait. Tout le monde se tu quelques instants et chacun fut pris dans ses pensées.
Puis Elaron, avec un un petit sourire aux lèvres, brisa le silence.
« Mais… les quatre essences DE la magie, ne pourrait-on pas considérer que c’est en réalité « DEUX » la magie ? Je sais bien que l’articulation est douteuse, un mauvais accent peut-être, mais croyez-moi, au cours de mes aventures j’ai pu rencontrer mille peuplades aux accents les plus farfelus. Ikit, passez-moi le cryptex je vous prie. »
Ikit tendit le au pistolier, préférant laisser le risque d’un potentiel fiasco dans les mains des autres. Il récupérerait l’objet brillant et finement sculpté après, de toute façon.
Elaron chipota à l’artefact, et un petit clic se fit entendre. Avec un sourire victorieux, il déposa ce qui était contenu dans le cryptex devant lui au sol, afin que tout le monde puisse voir.
Une page de manuscrit tomba au sol, ainsi qu’une sphère brillante d’une lumière jaunâtre. On aurait dit qu’un liquide magique était enfermé à l’intérieur, qui bougeait lentement, comme les nuages d’un plan céleste et extraordinaire. Netharius fut le premier à se prononcer :
« Je m’occupe de l’orbe, vous pouvez prendre le parchemin. »
Ikit décida qu’il ne s’agissait pas d’un débat qui valait la peine. Il avait entendu le ton de son compagnon qui suggérait qu’il ne lâcherait pas prise. Il trouverait d’autres objets de valeur plus tard, il pouvait être patient.
Le texte s’intitulait « Âme » et la page semblait avoir été arrachée à un manuscrit plus important. Il semblait parler de l’âme en tant que source de magie, et de son implication dans la manière dont le monde fonctionnait en relation avec cette essence. Les mercenaires remarquèrent alors que des notes avaient été ajoutées. Celles-ci critiquaient certaines passages, remettant en question des formulations ou simplement encourageaient le rédacteur dans sa démarche. Ils en déduirent qu’il s’agissait d’un ouvrage rédigé par quelqu’un qui avait séjourné dans le sanctuaire et qu’il avait été relu avant la publication ou l’achèvement de son livre.
Virgile demanda l’orbe à Netharius quelques instants : sa forme avait fait écho aux récipients à côté du cadran solaire. Il était certain que le fond circulaire pouvait accueillir cet objet. Délicatement, il déposa l’artefact à l’emplacement destiné. Une fois l’objet placé dans la grande coupe, un craquement se fit entendre et de la poussière tomba du toit tandis que toute la structure tremblait. Des dalles de pierre du sol s’enfoncèrent dans les ténèbres, et un escalier se dessina petit à petit, descendant dans les profondeurs du sanctuaire.
Virgile rendit l’orbe à son compagnon et se dirigea, arme à la main, vers l’escalier en colimaçon. En file indienne, ils descendirent d’une dizaine de mètre avant de se retrouver dans une petite pièce qui semblait être un débarras ou un inventaire. L’odeur de renfermé et sec se fit sentir dans la gorge. L’obscurité était la plus totale, mais la plupart des mercenaires pouvaient distinguer au moins les contours dans le noir, voire même observer les lieux comme en plein jour. Le seul qui alluma une torche fut Elaron. L’absence de lumière lui serait probablement fatal si un combat venait à éclater. En tant qu’humain (ne venant pas du Nidal), il ne pouvait pas voir davantage dans le noir qu’avec les yeux bandés.
De grandes étagères étaient placées dans la pièce, et des caisses étaient rangées, contenant principalement des plantes séchées, des fruits pourris ou des racines. Toute trace d’humidité avait été absorbée petit à petit par les plantes qui étaient maintenant mortes dans leurs pots. Il semblait que cela faisait des années que rien n’avait bougé, et l’immobilisme des conditions climatiques avait simplement figé cette scène de nature morte pour l’éternité. C’était maintenant destiné à changer : grâce, ou à cause, des aventuriers, l’air frais de la surface venait à nouveau se répandre dans les profondeurs du sanctuaire.
Ikit observa avec attention les lieux à la recherche d’objets de valeur, mais après quelques minutes d’inspection, il se rabattit sur les racines car rien ici ne brillait, alors peut-être que les plantes auraient certaines vertus. Il trouva une plante qu’il jugea comme comestible et capable de favoriser la cicatrisation des blessures. Il en prit quelques racines.
Deux portes permettaient d’entrer dans des pièces adjacentes, ils prirent celle de droite. Ils arrivèrent dans une sorte de marécage : des plantes luxuriantes et grasses étaient regroupées autour d’un petit étang. Netharius remarqua alors qu’une sorte de tunnel ou de canalisation était percée sur le haut des murs. Il ne savait pas exactement à quoi cela pouvait servir, mais il les montra du doigts tout en informant le reste du groupe au cas où cela ferait échos à quelqu’un.
Ils ne s’attardèrent pas dans cette petite pièce et continuèrent vers la porte menant à la pièce suivante. Une fois ouverte, ils purent assister à un spectacle bien plus impressionnant. Il s’agissait d’une sorte d’énorme dôme dans lequel un grand jardin s’étendait. De nombreuses plantes proliféraient, bien que l’abandon avait davantage profité les champignons et les lianes. De grands piliers étaient placés en une sorte de spirale, permettant aux plantes les plus grandes de grimper presque jusqu’au plafond.
En observant davantage, ils purent constater que certaines de ces plantes étaient vraiment massives. C’est alors que Netharius fit un petit signe silencieux aux autres, alors que Virgile avait déjà progressé vers les grands piliers. Tous s’arrêtèrent de bouger. Le thaumaturge avait crû voir un des grands champignons au plafond bouger. Dans la seconde d’après, tout le monde avait dégainé son arme et ils purent entendre le mouvement organique d’une plante qu’on arrache à un mur : un des énormes champignons, large d’au moins trois mètres et aussi grand en taille, se détachait avec force des pierres au-dessus d’eux, faisant tomber poussière et pourriture au sol. Netharius se souvenait avoir déjà vu cela quelque part. Il s’agissait d’un drakauthix, un grand fongique prédateur qui se développait dans les cavernes et les endroits sombres et humides. Un peu à l’apparence d’un énorme bolet, il pouvait dégager un gaz urticant pour les yeux et les muqueuses. Il flottait actuellement vers les aventuriers, déployant ses racines comme des tentacules menaçantes. Virgile activa sa rune d’invisibilité, voyant qu’il n’avait pas été remarqué par le spore… et c’est de justesse qu’il évita le coup qui venait de son dos. Trop absorbé par le champignon géant, il n’avait pas vu qu’une autre plante avait commencé à bougé. Une sorte d’énorme liane, flexible et rapide comme un chat, venait de refermer sa mâchoire à deux centimètres de sa tête. Sa disparition soudaine l’avait sauvé. Il pointa son jezzail vers la plante, tira puis se décala rapidement sur le côté, en espérant que la liane ne pourrait sentir ses déplacement. Malheureusement, la plante avait ressenti du mouvement : les dents végétales virent labourer le sol juste à côté du sniper qui sauta pour éviter d’être complètement gobé. Il décida de monter sur un des piliers pour prendre de la hauteur. Il en profita pour regarder ce qu’il se passait du côté de ses compagnons.
Le spectacle n’était pas extrêmement encourageant. Le spore s’était rapproché et n’était plus qu’à quelques mètres des mercenaires, toujours flottant dans les airs, et les frappait de toutes parts avec ses racines. La portée des attaques de la créature florale empêchait les combattants de riposter à leur plein potentiel. Alors qu’il venait de lancer une incantation, Ikit fut frappé par le champignon en pleine face, puis agrippé à jambe. L’ysoki planta ses griffes dans le sol tandis que les racines commençaient à le tirer vers le corps spongieux blanchâtre du fonge. Netharius vit une opportunité : il analysa la créature, et se rappela qu’il avait de la poudre de Kreleïs dans sa besace. Il était certain que c’était un répulsif puissant pour ce type de plante et d’un geste rapide qui montrait qu’il avait l’habitude de cette manipulation, il appliqua rapidement cette poudre sur son arme. L’instant d’après, il décrochait son bras squelettique afin de pouvoir avoir l’allonge nécessaire, et il frappa violemment la créature avec son fléau, ce qui permit au barde de se libérer quelques secondes plus tard.
Le seul qui se sentait plus ou moins dans son élément, c’était Elaron, et c’était surtout parce qu’il était le seul naturellement équipé d’une arme à feu tandis que les ses deux coéquipiers devaient trouver des stratégies pour atteindre le spore. Il lâcha sa torche au sol, le champignon était maintenant suffisamment près pour qu’il n’ait pas besoin de la rapprocher, et tira une balle qui vint perforer la surface du fonge et répandit un gros nuage de poussière végétale. Netharius et Ikit, tous les deux proches du champignon, toussèrent mais purent se rendre compte que les vapeurs n’étaient pas toxiques. Cela allait cependant gêner leurs actions car cela attaquait les yeux. Ayant libéré son ami ysoki, le thaumaturge fut la prochaine cible du spore. Les racines claquèrent et attaquèrent les chairs, ou du moins ce qui faisait office de chair pour Netharius. Les lianes le cinglèrent de toutes parts, et il s’empressa de lancer un sortilège nécrotique pour générer ses os brisés sous le choc. Il riposta avec force, écrasant son fléau d’arme sur la créature. Le champignon déploya une nouvelle fois ses racines frappa tous les mercenaires à portée et en profita pour attraper la jambe d’Elaron, le bras de Netharius, Ikit esquivant de justesse la plante, s’étant éloigné suffisamment. Le pistolier décida qu’il n’était plus le moment de fuir et au lieu de tenter de s’échapper des griffes végétales, déploya toute son énergie pour défaire le monstre. Suffisamment près du corps spongieux du spore, il fit un grand coup de taille, libérant un nouveau nuage de poussière et rechargeant d’un geste fluide et mille fois répété dans ses innombrables aventures. Il enchaîna avec un tir précis perforant le centre de la plante, essayant de viser ce qui pourrait être vital pour son ennemi, et il n’avait pas encore fini ! D’un mouvement fluide, il frappa à nouveau de son épée, plantant profondément la lame dans la plante prédatrice. La vie s’échappa du champignon et les mercenaires purent se libérer des racines étrangleuses qui les tenaient encore quelques secondes plus tôt.
Pendant ce temps, Virgile était toujours aux prises avec la liane-serpent. Ou plutôt, il était occupé à ne pas être pris par l’énorme plante carnivore. Grâce à sa rune d’invisibilité, il était parvenu à esquiver les coups, faisant particulièrement gaffe aux bruits qu’il provoquait pour induire la plante en erreur. Il était monté sur un autre pilier, un peu plus haut, pour recharger son arme et tirer un coup dans le tronc de la liane, mais il se rendit compte que ce faisant, il rapprochait le monstre floral de ses compagnons. Il prit alors la décision de sauter et de prendre la tangente. Il fallait forcer la liane-serpent à soit attaquer ses compagnons en lui laissant la possibilité d’ajuster ses tirs, qui pouvaient être mortels, il le savait, ou qu’elle le suive et qu’il puisse gagner du temps pour ses collègues. Le bruit de ses pas dans l’herbe et les feuillages morts se fit entendre et la plante cracha une grande gerbe d’acide dans cette direction, sans pouvoir distinguer si elle avait touché ou non. Virgile se posta derrière un pilier et rechargea son arme. La liane vint s’écraser contre la colonne et battit en retraite, voyant des cibles plus exposées, qui se rapprochaient d’elle.
En effet, Elaron, fort de son altercation avec le drakauthix, approcha de la liane-serpent avec précaution, prêt à esquiver dès qu’elle se projetterait vers lui… mais il n’avait pas vu que près du pilier duquel il se rapprochait, une autre plante avait légèrement bougé.
La mâchoire d’un attrape-mouche géant s’abattit sur lui et sa vision fut plongée dans les ténèbres. Durant tout le combat, la plante carnivore avait attendu, patiemment, que des proies potentielles passent dans son champ d’action. Netharius vint rapidement lui porter secours et après avoir appliqué une autre substance de sa propre préparation, il frappa la plante qui se mit à prendre feu. La liane-serpent profita de son inattention pour lui arracher un pan de son armure, le blessant au passage. Ikit était davantage en sécurité, car les assauts étaient focalisés sur ses compagnons, et il entonna une mélopée encourageante, qui redonna force à ses camarades. Alors que le thaumaturge faisaient quelques pas pour se mettre à l’abri, Elaron se débattait dans la gueule de l’attrape-mouche. Netharius usa de sa magie pour se remettre sur pied et reformer ses os brisés, puis il revint à la charge en frappant la plante qui retenait son compagnon. Les feuilles furent coupées par les bords perçants de l’arme et le pistolier tomba au sol. Les deux plantes se mirent alors à se battre pour leur nourriture.
Le combat s’arrêta presque aussi brutalement qu’il n’avait commencé : Virgile ajusta sa visée et frappa la liane-serpent à sa base, Netharius frappa à nouveau de son fléau qui brûlait la plante carnivore, puis Elaron coupa l’autre en deux d’un grand coup d’épée, tout cela en synchronisation avec le sortilège lancé par l’ysoki à couvert quelques mètres plus loin.
Les deux plantes s’écrasèrent au sol dans un grand bruit, puis le silence revint dans le terrarium...
Date du Rapport
03 Mar 2024
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