La forteresse des géants de pierre - 3

Elvarir et Hécate se trouvèrent dans un long boyau de pierre noyé de brume violette et verte. Des gémissements de bébés en pleurs, battus et torturés, emplissaient l'air. Hécate, prise de surprise, combattit la vague de panique et se jeta sur son sac pour vérifier l'une de ses boîtes. Rassurée qu'aucun pleur enfantin n'en provienne, elle revint à la situation présente : que faire ?   Les deux aventuriers finirent par suivre la brume que le vent poussait. Ils marchèrent longtemps, longtemps, jusqu'à sortir du boyau et se trouver soudain au milieu d'une immense platitude baignée d'un brouillard toujours de la même couleur pourpre verdâtre. Près d'eux, des cercles et des cercles de rituel, brillant d'une lumière violacée, nouaient ensemble divers signes de Lamashtu. A bien y regarder, certains des signes, en forme d'yeux, de plumes ou d'aiguilles, maintenaient en place ceux de la mère des monstres, lesquels se débattaient irrégulièrement, plus ou moins inefficaces à briser l'étau.   Dieu du feu fit la chose du monde que ses tripes lui criaient le plus, il y mit la main. L'énergie des signes d'yeux lui paraissait dangereuse et quitte à la combattre, autant s'allier avec l'une des plus puissantes déesses du multivers, n'est-ce pas ?   Hécate le traita d'idiot.   Les plumes vertes s'attaquèrent à l'esprit d'Elvarir et à la divinité de Dieu du feu, cherchant à pénétrer son âme. La lutte fut dure. Enfin il parvint plus ou moins à s'extirper en un seul morceau, ayant prêté de sa puissance à Lamashtu. A défaut d'autre chose, sans savoir comme l'histoire finissait sur ce plan, ils se retrouvèrent de nouveau dans le temple des lamies, désormais occupé par un très notable trou.   Pour la troupe qui était restée sur place, il s'était à peine déroulé une poignée de secondes. On exigea un rapport sur ce qui s'était passé, et est-ce que tout allait bien ?   Après quelques explications, et le récit à peu près complet de l'aventure, le groupe approuva l'hypothèse d'Hécate selon laquelle le Paon, la divinité vénérée par l'ordre thessarique qui avait construit la Tour Noire, avait tenté de détourner de l'énergie de Lamashtu. C'était un problème, évidemment, mais il n'y avait rien qu'ils puissent y faire, alors ils s'enfoncèrent plus profondément dans les souterrains et revinrent à leur quête : vaincre Mokmurian pour faire cesser la guerre entre les géants et les humains.   Ils descendirent donc, sans Patte-de-Lapin qui, ayant récupéré son anneau, avait repéré une cuisine à razzier, et sans Isva qui trouvait vraiment le boyau qu'ils avaient déniché trop petit pour qu'elle les y suive (elle aurait sans doute pu essayer... mais franchement ç'aurait été inconfortable et il faisait déjà beaucoup trop chaud).   Le tunnel s'enfonçait profondément sous terre et déboucha sur un complexe en ruine qu'Hécate identifia immédiatement comme les profondeurs originelles de la Tour Noire, la suite du monastère thessarique. Des couloirs entiers s'étaient effondrés, mais le groupe suivit un chemin balayé pour traverser une salle de réduction (redoutable, ça) et une pièce où se trouvait un chaudron de création d'esclaves runiques (ça aussi, rien que se tenir à côté, dangereux), tout en étant harcelés par un scanderig décidé à tenter sa chance pour les avaler à chaque ouverture - la détection paladine du mal de Corvane servit autant que les explosions et sorts préparés d'Hécate et Fangecroc. Le Paon cependant n'en avait pas fini avec eux, mais il perdit l'altercation suivante. Le sac de jute cependant en fut sensiblement altéré, puisqu'il s'y ouvrir un portail vers le domaine divin de Dieu du feu, où se dernier venait de rattacher un morceau arraché à celui du Paon.   Ils tombèrent sur des gardes zombies qui devaient avoir été postés par Mokmurian, et se déclarèrent désormais d'autant plus sur leur garde que le mage avait certainement été informé par télépathie de leur arrivée par cette altercation.