La Nordanie

Empire du nord et du froid, la Nordanie est composée de terres gelées, couvertes d’un manteau blanc durant presque trois teintes par année pour les régions les plus méridionales. Celles plus au nord, où règne en permanence un climat arctique, sont invivables sans un équipement spécialisé. Ce territoire se distingue par ses habitants durs qui ont appris très tôt à ne compter que sur eux-mêmes, retranchés derrière les murs des trois cités-soeurs. La vie, régie par le climat rigoureux, est bien loin de celle des mégalopoles surpeuplées de la Pentapolie, de l’Antipolie ou même du Lansk. Le quotidien d’un Nordanien mélange subtilement modernisme et traditionalisme. Le pays s’est converti à un culte matriarcal appelé l’Hivernance venu de l’extrême septentrion. Ses préceptes régissent la vie sociale et servent de trait d’union entre la religion et la politique. Depuis des générations, les dames blanches, prêtresses attitrées, préparent une gigantesque migration nationale, la Transhumance, qui nécessite d’amasser ressources et savoir-faire afin de réussir. Pour y parvenir, de nombreux Nordaniens se sont éparpillés sur l’ensemble de la Toile pour vendre leurs services en tant que mercenaires. Ils ont fait de leur terre un pays riche et industrieux, en restant neutres pendant les guerres d’Acrymonie et en servant chaque belligérant allant parfois même jusqu’à lutter contre leurs propres frères d’armes. Au fil des années, ils ont étendu le mercenariat à de nombreux secteurs, comme les sciences ou les plaisirs, s’efforçant d’atteindre à chaque fois l’excellence. Cette quête de perfection est supervisée par les maisons-mères qui fédèrent chaque secteur d’activités et jouent en quelque sorte un rôle similaire à celui des konzerns sur les restes de la Toile. Chaque famille a l’obligation d’y placer un enfant qui sera élevé dans la conviction que son sacrifice servira la Transhumance de son peuple. Ces cadets s’entraînent alors sans relâche pour atteindre une perfection qui parfois même est entrée dans les légendes de la Toile. Jusqu’aux Provinces rhodésiennes, on a entendu parler des floconniers, des concubines du redoux, des architectes tempérants, des phalanges du sérac, des veneurs de glace, etc. Les maisons-mères ont des antennes dans de nombreuses cités de la Toile : les fameuses tours carrées, véritables ambassades de la Nordanie au sein des autres nations. Les maisons-mères entretiennent d’étroits rapports avec les dames blanches dont certaines épousent les dirigeants.

Tout le reste de la Toile considère la Nordanie comme un pays mystérieux, sous la coupe d’un matriarcat aux visées incompréhensibles. Ainsi, même si les gens du nord restent respectés pour leurs talents et leur discipline, personne ne parvient à comprendre les sacrifices physiques et matériels ni l’ascétisme moral exigés par les dames blanches. Les Nordaniens donnent l’impression de faire front commun, de former un véritable bloc de glace lisse et froid face aux contrats qu’ils acceptent.  Pourtant, cette unité autour de l’Hivernance commence à se fissurer, surtout dans le sud du pays. Là, le nombre de détracteurs augmente sous l’impulsion de l’ancienne noblesse du Moyécryme.

Scindée en deux cités superposées, Dorvik est constituée du Bas-Dorvik et du Haut-Dorvik et supportée par cinq gigantesques piliers de pierre. Toujours à l’ombre, la première vit dans une constante humidité qui lui permet de cultiver en abondance mousses, champignons et moisissures. Les brumes se condensent sous la Dalle du Haut-Dorvik et retombent sous forme de grésil quand elles ne forment pas des stalactites. Malgré l’ombre, les Bas-Dorvais se déplacent sous d’épais parapluies. La partie supérieure repose sur une immense « dalle » s’étendant sur une petite dizaine de kilomètres. Constamment exposée au froid provenant en particulier du sol, le Haut-Dorvik est un lieu insigne pour les adeptes de l’Hivernance propices à de nombreux rituels et à la tenue d’archives de glace. Beaucoup de marchands itinérants paieraient cher pour avoir accès à cette partie de la cité et à ses eaux réputées les plus pures de la Toile, mais les dames blanches rechignent encore à l’ouvrir aux étrangers.

Construites initialement à l’identique, Gottenborg et Souspente se sont distinguées au fil des ans. Reliée au reste de la Toile, Souspente a en effet connu un développement plus rapide. Les deux cités n’ont cependant pas renié leur passé commun : le mercenariat. Elles restent l’épicentre de cette activité lucrative et sont officiellement dirigées par les maisons-mères qui exportent leurs mains-d'œuvre et leur savoir-faire à travers la Toile, tout en rapportant les principaux biens de consommation de la Nordanie. Il est toutefois de notoriété publique que les cités comme le reste du pays sont sous la coupe des dames blanches qui sont présentes dans chaque famille mercenaire. Autre point commun entre Gottenborg et Souspente : pour s’y déplacer, les habitants utilisent des luges.